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Claire & Yvan GOLL
Claire & Yvan GOLL
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3 décembre 2008

Nino Frank en 1926

"900 "- Cahiers d'Italie et d'Europe - n° 1, Cahier d'Automne 1926 . Fondateurs :

Massimo Bontempelli - Curzio Malaparte. (1)

Proses de : Bontempelli - Mac Orlan - Barilli - Alvaro - Gomez de La Serna - Soupault - Kaiser : " Juana " p.67 à 83 (Tragédie en un acte : traduction française d'Ivan Goll) - Emilio Cecchi - Aniante - Solari - Joyce - Goll : " L'Eurocoque " (2) p.132 à 138 - Campanile - Spaini - Mouratoff - Nino Frank : Astérisques (p.185) - Alberto Cecchi Dessins de : Oppo - Conti - Lydis - Rosai.

Editions " La Voce " Roma - Firenze

Astérisques : Nino Frank p.185

"Ivan Goll, l'homme qui chante tout le long de sa vie. Impossible de ne pas voir qu'il est allemand. Il a un rire couleur du Rhin. Des lunettes qui agrandissent l'oeil, clignant comme les lumières de Nüremberg, dans la nuit de la fantaisie. Impossible de ne pas voir qu'il est français. Il est plein de sourires, d'ironie foraine. Son oeil se fixe sur tout spectacle, il en profite pour oublier la versification ; il crée de mystérieux projets de cosmogonies nouvelles.

Mon cher Robert Delaunay, surveillez Goll ; c'est l'homme qui un jour ou l'autre vous volera la tour Eiffel pour l'emporter.

Où?  "

Nino Frank parle également de Goll dans le numéro 23 ( novembre 1949) de La Table Ronde: Souvenirs sur James Joyce p.1671 à 1693, où il indique le rôle de Goll dans cette rencontre, de même dans :

Mémoire brisée , Calmann Lévy, 1967 où il relate l'aventure de la revue "900" et de "Bifur ". Il y est souvent question de Goll et de ses relations avec Joyce (p. 30 à 64), Malraux (p. 281 / 82) et dans

Nino Frank . 10. 7. 2. et autres portraits Souvenirs

Papyrus - Maurice Nadeau 1983

(p.70 - 72) :  "En ce temps-là, tous les intellectuels du monde vivaient de Paris. Je me trouvais préposé aux relations extérieures d'une revue créée à Rome par Massimo Bontempelli, et qui allait paraître en langue française sous le titre de "900 ", - vingtième siècle dit à l'italienne. Résolument cosmopolite, cette publication entendait cultiver la poétique en vogue …Ma tâche devait consister essentiellement à assurer la liaison avec un comité de direction où l'on souhaitait voir figurer Pierre Mac Orlan, Georg Kayser, Ramon Gomez de la Serna, Ilya Ehrenbourg qui les rejoindra, et surtout, pour les lettres anglaises et américaines, l'Irlandais James Joyce.

L'idée me venait d'Ivan Goll, qui participait, en ce temps-là, à la fabuleuse adaptation collégiale de quelques pages de ce qui s'appelait encore Work in progress: lui-même en contact suivi avec Joyce, au nom des Editions du Rhin, qui envisageaient publier une traduction d'Ulysses. Point de meilleur parrain, toujours tenace, toujours souriant. Mais l'entrée en rapport avec Joyce ne fut pas chose aisée .

Un cordon littéraire, si je puis dire, était tendu autour de lui. Goll, cornac opiniâtre, me fit tenir maints longs conciliabules dans les librairies jumelles de Sylvia Beach et d'Adrienne Monnier, rue de l'Odéon …

Un après-midi, Ivan Goll réussit enfin à m'emmener chez le mystérieux Irlandais, square Robiac ".

(p.211-212):  "Fin 1926. Une après-midi chez Ivan Goll, au sourire rhénan, tout bonhomie et amitié à travers les lunettes. Etendue sur un divan, très poétesse style Rhomanisches Kafé, Claire au visage triangulaire et blond de chatte, la parole humoresque embuée de Gemütlichkeit ; la lui disputant, cette parole, Clara (nous apprendrons aussitôt son nom), le doigt levé, la phrase pétulante et volontiers précieuse, petite, à la fois floue et ramassée, le nez épais et de beaux yeux songeurs, je ne sais quoi d'enchifrené dans ses attitudes …

L'attraction est ailleurs: ce jeune homme à qui m'amène Ivan Goll et avec qui la conversation s'engage vite à la façon d'un jeu serré …deux ou trois jours plus tard, à la Brasserie Lutétia: il me fait passer une espèce d'examen, puis c'est dit, il me promet un texte pour la revue dont je m'occupe "Ecrit pour un Ours en peluche ", qui paraîtra dans "900 "à Rome ; trois ou quatre ans plus tard, il me donnera, pour BIFUR, un chapitre inédit des Conquérants . La voie est ouverte à l'amitié.

Nous nous rencontrerons souvent.…Clara se raconte avec complaisance: ses bonnes fortunes, l'opium, son goût pour les baignoires, des velléités de partie carrée. J'apprends cela avec quelque impatience. Moi, c'est le garçon qui m'intrigue: ce quelque chose, en lui, d'affamé, de pressé, de hanté, rien qui s'accorde avec la littérature ingénieuse et chantournée qu'il fait. Sa préciosité plaisante, ses manières de gourmet parisien (nous dînons chez Montagné ou Place des Victoires, il y entre avec respect), son intellectualisme un peu mièvre, puis, subitement, une fulgurance de l'idée et de la parole, vite bridée (car Clara enchaîne sur-le-champ, avide de parler: et lui, aussitôt, de se taire, un peu petit garçon, le regard complice, presque admiratif ; cependant qu'elle a ce geste des péroreuses de salon par lequel celles-ci retiennent à l'avance toute interruption). "

p.229 :  "…Moi, j'ignorais tout de son œuvre (Ehrenbourg), et son nom, son adresse, m'étaient venus d'Ivan Goll, en ce temps-là mon mentor dans la cosmopolis parisienne.…

— Il faut que j'y réfléchisse encore, dit Ehrenbourg, en se levant et en changeant de pipe (ses poches en contenaient toujours trois ou quatre). Venez me voir, avant que je déménage, ajouta-t-il, et, en remettant sa casquette de travers, il prit la porte, de son petit pas pressé.…

Je courus téléphoner à Ivan Goll: mon récit le divertit, et il m'expliqua qu'Ehrenbourg, poète mystico-décadent à ses débuts, style Saint-Pétersbourg 1910, s'était mué, la Révolution venue, en gazetier satirique, en feuilletoniste abondant, qu'il était marqué par le Berlin de Georg Grosz, où il avait trouvé succès et profits, qu'il s'était parfaitement acclimaté à Montparnasse, où il oubliait Moscou: le seul des Soviétiques qui fût européen, avec la bénédiction de Maxime Gorki. "

p. 297 :  "Pour (Gottfried) Benn, médecin comme(William Carlos) Williams, et le plus grand poète allemand de son temps, il est également possible que sa collaboration à Bifur l'ait quelque peu compromis — en l'obligeant en particulier à adhérer du bout des lèvres et le plus tard possible, au parti national-socialiste. J'ai raconté ailleurs mes rencontres avec lui, à Paris et à Berlin. Il m'écrivit aussi, et, avec l'aide d'Ivan Goll, toujours présent, toujours amical, j'eus les textes que nous voulions ".

(1) Chaque saison un cahier par les soins de Massimo Bontempelli - Ramon Gomez de La Serna - James Joyce - Georg Kaiser - Pierre Mac Orlan .

(2) Ces sept pages sont inédites. Un an plus tard en Allemagne paraîtra "Die Eurokokke",  une version française paraîtra chez Corréa en 1934 sous le titre:  Lucifer vieillissant,  mais à ce point différente de la version allemande que Claire Goll a traduit "Die Eurokokke" par son titre "L'Eurocoque": cette traduction,  inédite à ce jour est archivée à la B.S.D.d.V. — Ms 549 (47 ff. Dactylographiés)

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